En l’absence de l’imprimerie, la diffusion du Codex Calixtinus fut très faible, et n’étant que très peu copié, il n'eut aucune influence réelle sur les pèlerins. Toutefois, l'intérêt de son livre V n’est pas moindre : il constitue un pittoresque témoignage du quotidien des pèlerins et des voyageurs, et procure de savoureuses observations sur les pays traversés, les mœurs médiévales et les sanctuaires, dues aux maîtres ou écoliers qui le rédigèrent.
« Il y a quatre routes qui, menant à Saint-Jacques, se réunissent en une seule à Puente la Reina, en territoire espagnol ; l’une passe par Saint-Gilles, Montpellier, Toulouse et le Somport ; une autre par Notre-Dame du Puy, Sainte-Foy de Conques et Saint-Pierre de Moissac ; une autre traverse Sainte-Marie-Madeleine de Vézelay, Saint-Léonard de Limousin et la ville de Périgueux ; une autre encore passe par Saint-Martin de Tours, Saint-Hilaire de Poitiers, Saint-Jean-d’Angély, Saint-Eutrope de Saintes et la ville de Bordeaux.
La route qui passe par Sainte-Foy, celle qui traverse Saint-Léonard et celle qui passe par Saint-Martin se réunissent à Ostabat et après avoir franchi le col de Cize, elles rejoignent à Puente la Reina celle qui traverse le Somport ; de là un seul chemin conduit à Saint-Jacques. »
(traduit par Jeanne VIELLIARD - Le Guide du pèlerin - Vrin - 1997)
Le routier d'Avignon ©B. Delhomme |
Dès la deuxième moitié du XIXe siècle, le livre V du Codex Calixtinus a stimulé l’imagination des historiens. Ils sont partis en quête d'indices pour reconstituer l’écheveau des itinéraires des pèlerins et ont inventorié :
Ils ont vu dans les routes qu'empruntaient les pèlerins de saint Jacques des axes de diffusion de certaines formes d’architecture et d’une littérature d’épopée (la chanson de Roland par exemple).
Ils ont cristallisé une réalité millénaire et mouvante à travers des cartes qui ont servi à tracer les sentiers pédestres d’aujourd’hui.
Le développement de la randonnée pédestre à partir des années 1950 a inspiré l’idée de rétablir la tradition médiévale. Dans un monde où la voiture est reine, l’invention du sentier de randonnée a permis de sécuriser le parcours des randonneurs.
A partir de 1970, les itinéraires jacquaires inspirés du « Guide du pèlerin » et tracés sur la base des itinéraires pensés par les historiens ont été cristallisés sous la forme de sentiers de randonnée. Leur tracé, gage de confort et de sécurité, sont des compromis entre l'histoire et la réalité actuelle. Il s’agit d’éviter le goudron, les voitures et les propriétés privées, de tenir compte des capacités d’accueil et de l’intérêt esthétique des lieux.
Le foisonnement des itinéraires compostellans et l'éclosion spontanée de chemins a nécessité la mise en place d'une classification des chemins. Pas de chemin secondaire : tous ont leur caractère et leur grandeur.
En France, les itinéraires sont souvent des sentiers de grande randonnée GR® balisés par la Fédération Française de la Randonnée Pédestre.
Certains itinéraires sont tracés et entretenus par des associations sans avoir le label GR® : on les appelle « itinéraires pèlerins ». Parmi eux se trouvent la Via Arverna en Auvergne, la liaison entre Rocamadour et l’itinéraire de Vézelay à travers le Périgord, les « chemins catalans » créés par le Conseil Départemental des Pyrénées-Orientales, la « voie de la Charente » créée par le Conseil Départemental de la Charente ...
En Europe, 305 chemins dits de saint-Jacques sont aujourd’hui diversement aménagés, fréquentés et valorisés.